La télé est envahie par les pubs pour les préservatifs et la bière: c'est carnaval!
Notre compagnie de danse a été invité comme "comissão da frente" par l'école de samba "Quem São Eles" (= qui sont-ils). C'est justement l'école de samba de notre quartier, celle dont le hangar est planté dans le même pâté de maison que notre appart et qui nous casse trop souvent les oreilles… Au moins, maintenant, on les trouve plus sympathiques!
J -7: dernière répétition dans les rues de Belém
C'est le dernier dimanche avec "arastão" pour notre école de samba, alors on en profite pour aller les retrouver, s'imprégner un peu de l'ambiance carnaval, leur révéler notre choré et la tester sur le bitume des rues du quartier.
On débarque parés du nom de notre compagnie, tout en noir: plutôt classe et pro mais pas très gai pour un carnaval… Rendez-vous 16h – traduction brésilien-français: les choses se mettent finalement en branle à 18h. Ca, on s'y attendait! Alors on en profite pour papoter et bien sûr (c'est incontournable avec des brésiliens) faire des photos! Voilà notre troupe et puis nos mecs: photo qui prend tout son charme quand on connait les folles qu'ils sont en réalité!!
Hop, c'est parti. Chacun prend sa place et les structures nues des chars s'intercalent elles aussi. Devant nous, quelques gros bras improvisent le blocage de la circulation à chaque carrefour que notre long cortège traverse, où le boucan de notre batteria se noie un instant dans une pluie de klaxons quand les plus débiles ne forcent pas le passage à travers la foule.
La samba tourne en boucle sans aucune pause entre chaque reprise alors notre chorégraphie en fait de même. 900m à parcourir au total, réussir à faire la choré en avançant alors qu'on l'a toujours travailler dans une salle fermée, arriver à éviter les trous béants de l'avenue, résister aux montées, profiter des descentes et surtout trouver à quel moment respirer! Sacrée épreuve d'endurance, c'est mortel! Heureusement Pierre nous a fait ravitailleur d'eau au fil du parcours, mais le jour J: niet.
J -2: répétition générale au Sambodrome
En route pour la "Aldeia Cabana", toujours dans notre costume noir, rendez-vous 19h30. Ca papote, ça installe encre le son… bref, 21h rien n'a encore commencé alors la pluie se décide à ouvrir les festivités dans toute sa tropicalité: tous aux abris! Une demi-heure se passe et la pluie ne fait que surenchérir alors la batteria se mouille et commence à tambouriner.
Le président de Quem São Eles vient nous rassurer: on n'est pas obliger de se saucer avec eux, c'est à nous de voir. Concertation: s'ils y vont, on ne va quand même pas jouer les snobinards à rester au sec, on y va aussi! Aller, on se motive et hop, on patauge dans les flaques et on file sous la douche. Il ne nous a pas fallut bien longtemps pour se fondre dans l'ambiance: 1 minute à peine et on nageait déjà dans nos chaussures! Sauter et gesticuler pour ne pas prendre froid.
Au bout d'un quart d'heure d'attente, le président prend la parole: "ce ne sont pas des conditions de répétition, alors advienne que pourra, on donnera notre mieux mais on ira directement au défilé de samedi sans répétition". Quoi!? Maintenant qu'on est détrempé, juste quand on bouillait de motivation!?! On a parlementé un peu avec lui et il a fini par nous dire: "si vous y tenez vraiment, j'organise mes troupes".
Voilà comment nous avons finalement lancé la répétition, plein de fougue, sous une pluie toujours battante. Au début, on avait même du mal à organiser notre progression tellement les gouttes s'acharnaient sur nos yeux. A chaque levé de jambe c'était un balai de jets d'eau qui jaillissaient de nos chaussures!! La pluie a fini par s'affiner un peu mais elle nous aura persécutés jusqu'au bout.
Jour J: le défilé des écoles de la première division
Notre école de samba est programmée pour clôturer cette nuit de carnaval alors départ de notre défilé prévu à 5h du mat! Avant? Rendez-vous minuit à l'école de danse pour grignoter, se préparer et se mettre dans l'ambiance avec un peu de musique et un peu de ricard que Pierrot et Seb distribuaient.
4h du mat, arrivée sur place. On aperçoit les chars des écoles qui attendent encore leur tour: il fallait s'en douter, le carnaval a pris du retard… 6h, la pression monte, on se positionne sur la ligne de départ et la batteria lance le son pour faire monter l'excitation. On s'échauffe, on réajuste nos têtes qui commencent déjà à nous faire mal, on se concentre, on s'embrasse et… en place!
50 minutes de défiler, 50 minutes de danse non stop. Il faut penser à tout. Ne pas trop se donner sur le début, éblouir la presse et puis surtout séduire les juges. J'ai tellement pensé à chanter que j'en ai un peu oublié de sourire… Il faut tenir jusqu'à ce que nos pieds écrasent le "final" peint à l'autre bout. Ensuite, on engloutit des litres d'eau en regardant le reste du cortège de Quem São Eles qui continue d'arriver pendant encore 10-15 minutes!
C'est vraiment fou ce carnaval. Chaque école fait défiler entre 1000 et 1500 personnes et le public était encore bien présent à l'aube! Il y a des chars magnifiques. Les gens vous encouragent comme si vous étiez sur le point de remporter l'or olympique. Leur école de samba, c'est toute leur vie! Et encore Belém n'est qu'un carnaval tout petit pour le Brésil… On a aperçu celui de Rio à la télé, ils avaient construit un char que des Batman descendaient à ski!!!
J +3: les résultats de la compétition
Notre modeste école arrive 4ème avec 347 points, à seulement 2 points du champion. Pas mal du tout!
Carnaval est fini. La vie reprend doucement au Brésil mais certains planchent déjà sur le Carnaval de l'année prochaine…